La succession académique des Kuhnholtz-Lordat est la suivante :
Henri (1794-1877), père de :
Achille (1820-1893), père de :
Gérard (1860-1925), père de :
Georges (1888-1965)
Georges Kuhnholtz-Lordat est né le 8 janvier 1888. Il passe le bac à Montpellier, en 1905. En 1907, il entre à l'Institut National Agronomique de Paris et obtient donc le titre d'Ingénieur agronome. En 1913, il est recruté comme répétiteur à L’Ecole Nationale d’Agriculture de Montpellier (ENAM, devenue depuis Montpellier SupAgro). En 1914, il passe une licence de Sciences naturelles à l'université de la ville. Puis il est mobilisé. En 1919, il entre comme préparateur de botanique à la Faculté des Sciences de Montpellier. En 1921, il est Chef de travaux. En 1924, il soutient sa thèse « Les dunes du Golfe du Lion, essai de phytogéographie ». Homme novateur et de fort caractère, il se fait quelques ennemis jusqu’au sein de son jury de thèse !
En 1925, il quitte l'université et devient professeur de Botanique et de Sylviculture à l’ENAM. La même année, il reçoit une Médaille d'or de l'Académie d'Agriculture de France pour sa thèse ainsi reconnue. Travailleur acharné et esprit méthodique, il trie et classe la bibliothèque de son nouveau laboratoire. Lisant tous les livres, il créé un fichier général par matière et par auteur. Il constitue aussi un fichier phytopathologique à double entrée permettant de retrouver, soit les parasites à partir des hôtes, soit les hôtes et leur localisation géographique, à partir des parasites. À l'époque, tous ces fichiers étaient uniques dans leur genre au plan national et on venait de loin pour les consulter.
En plus Kuhnholtz rédige une œuvre considérable. Son livre « La terre incendiée », publié en 1938, est un classique figurant dans toutes les bibliothèques des laboratoires de botanique. Il vaudra à son auteur une seconde Médaille d'or de l'Académie d'Agriculture. Sa « Flore des environs immédiats de Montpellier » constitue également un ouvrage de référence. C'est l'occasion pour l'Académie d'Agriculture de décerner à Kuhnholtz une troisième Médaille d'or. Le professeur sera élu membre correspondant de cette compagnie, en 1952.
Par ailleurs, ses études d'écologie l'ont conduit à établir les principes d'une « cartographie parcellaire de la végétation » en liaison avec les activités humaines.
En 1953, après 28 ans passés à l’ENAM, Kuhnholtz-Lordat démissionne de son poste de professeur. « Je ne peux pas, dit-il, tolérer la réduction de crédit qu'on prétend m'imposer ». En fait, il a déjà 65 ans. De 1955 à 1958, il termine sa carrière à Paris, comme professeur d'Écologie et Protection de la Nature au Muséum National d'Histoire Naturelle.
Ensuite, il résume sa carrière dans un incroyable curriculum vitae de 45 pages, émaillé de souvenirs, de réflexions personnelles. Il règle au passage ses comptes avec quelques personnalités lui ayant déplu. Il utilise un ton caustique et affecte une grande désinvolture. À l'en croire, il fut, pendant la guerre de 14-18, un officier peu brillant, versé à l'État-major de l'Infanterie Divisionnaire n°35, en raison de sa compétence appréciée au jeu d'échec ! Il prétend même avoir eu le temps de s'initier à la pétanque entre deux déplacements de son régiment. Bref, il s'est promené pendant que les autres se battaient ! La réalité est cependant fort différente. La citation reçue par lui, en 1915, est éloquente (il ne l'a pas reproduite dans son curriculum) : « Kuhnholtz-Lordat, lieutenant au 326ème d'Infanterie s'est brillamment conduit le 28 août; commandant la section d'avant-garde le 31 août, a fait preuve, pendant cette journée, qu'il a passée tout entière sous un feu des plus violents, de belles qualités d'entrain et d'énergie. A été pour les hommes un admirable exemple ». Cela lui vaut la Croix de Guerre avec palme. Kuhnholtz fut en fait cité trois fois : à l'Ordre du Régiment, à l'Ordre du Corps d'Armée, à l'Ordre de l'Armée. Ainsi se plaît-il à tromper, à se cacher derrière un masque. Un de ses ouvrages, publié en 1965, s'intitule d'ailleurs : « Tout est masque ». Il s'agit d'un essai dans lequel il s'amuse à analyser comment Pagnol, Colette et Bernardin de Saint-Pierre décrivent le milieu naturel et végétal, dans leurs œuvres.
Kuhnholtz-Lordat éprouve une affection particulière pour la droite, républicaine ou même bonapartiste. Il écrit, en 1962, un livre « Napoléon III et la paysannerie française » dans lequel il tente de démontrer « l'affection sincère de l'Empereur pour le monde paysan ».
Pierre-Paul Grassé, membre de l'Institut (discours prononcé à l'occasion du centenaire de l'ENAM en 1973) : « Qui, par exemple, évoque le nom de Kuhnholtz-Lordat lorsqu'on parle de l'écologie ? Et pourtant Kuhnholtz est le plus original, le plus profond, le plus intelligent des écologistes français : l'écologie dynamique est sa création. Son opposition à un système très en faveur, qui voyait et voit encore dans les groupements végétaux des êtres de raison, lui a valu d'être considéré comme un naturaliste se tenant en marge des grands courants scientifiques. Cela est inexact et injuste. Tout au contraire, Kuhnholtz fut un novateur et c'est lui qui a vu juste. Son “écologie parcellaire” est un chef-d’œuvre inégalé, hélas méconnu ».
Jean-Paul Legros (extrait de La Gaillarde à Montpellier)