Bernard Chédozeau nous a quittés à l’âge de 84 ans. Très affaibli depuis quelques années, il s’était peu à peu mis en retrait et avait finalement renoncé à toute activité depuis 2018. Elu au sein de notre Académie en 1999, il en occupait le 20e fauteuil, dans la section des Lettres, ayant succédé à Anne Blanchard. Agrégé es Lettres en 1961, et docteur d’Etat en 1977 (sa thèse portait sur Pierre Nicole), Bernard Chédozeau avait exercé les fonctions d’Inspecteur pédagogique régional en Alsace, en Bourgogne et à Paris. Lors de sa réception, le 15 novembre 1999, le pasteur André Gounelle, qui était son parrain, avait particulièrement souligné la qualité de ses travaux portant sur le monde de Port-Royal. Bernard Chédozeau avait consacré en effet l’essentiel de ses recherches à l’étude de ce milieu intellectuel et spirituel fort complexe, souvent caricaturé, et dont il se plaisait à saisir, avec sa modestie et sa clairvoyance coutumières, les audaces ou les anticonformismes.
Membre de la Société des Amis de Port-Royal, il a souvent publié dans les Chroniques de cette association savante. Bernard Chédozeau s’intéressait plus généralement à tous les aspects théologiques ou spirituels du XVIIe siècle, notamment aux questions touchant à la traduction de la Bible ou à la diffusion de l’esprit tridentin. Il publia sur ces sujets des ouvrages importants : La Bible et la liturgie en français. L'Église tridentine et les traductions bibliques et liturgiques (Cerf, 1990), Choeur clos, choeur ouvert. De l'église médiévale à l'église tridentine (Cerf, 1998), Le Baroque (Nathan, 1989). Au sein de notre Académie il occupa la charge de bibliothécaire-archiviste de 2003 à 2017, aux côtés de Jean Hilaire. Il co-organisa en 2014 le colloque sur la pensée symbolique. Parmi ses interventions à l’Académie, on mentionnera ses deux dernières conférences, celle du 26 mars 2012, « La Bible de Port-Royal : une tentative pour concilier l'héritage de la spiritualité médiévale et les valeurs cartésiennes ? », et celle du 29 février 2016, « Condorcet, un philosophe des Lumières, un humaniste ». Ses conférences connaissent un succès certain sur le site web de notre Académie dont il a ainsi contribué à assurer le rayonnement.
Bernard était, au sens fort et plénier du terme, et selon le modèle idéal forgé par le XVIIe siècle, un « honnête homme », sur le plan moral comme sur le plan culturel. Tous ceux qui l’ont croisé se souviennent de sa discrétion et de sa bonhomie. C’était en effet un être doux, affable et courtois, avec lequel on appréciait le plaisir de la conversation. Son savoir était d’autant plus impressionnant qu’il demeurait toujours circonscrit dans les limites d’une modestie de bon aloi, tout en restant très ouvert à la discussion et à la contradiction. Tous ses écrits portent la marque et le témoignage d’un tel état d’esprit, comme une invitation à ne pas laisser la pensée s’assoupir.
Christian Belin, Université Paul Valéry
Voir l'éloge prononcé par Michel Hilaire :
https://www.ac-sciences-lettres-montpellier.fr/academie_edition/fichiers_conf/HILAIRE-CARBASSE-AUFRERE-2022.pdf
Voir encore la réponse d'André Gounelle quand Bernard Chédozeau fit l'éloge d'Anne Blanchard :
https://www.ac-sciences-lettres-montpellier.fr/academie_edition/fichiers_conf/CHEDOZEAU-ELOGE-BLANCHARD-REP-GOUNELLE-1999.pdf
Voir travaux sur BNF :
https://data.bnf.fr/fr/12136523/bernard_chedozeau/